Contrairement à sa précédente décision d'il y a un an déjà (4 juin 2007), le ministère de la défense a finalement décidé de tester le système anti-roquette Vulcan Phalanx. Le ministre avait préféré alors le système de la société israélienne Rafael "Iron Dome" qui n'a pas encore fait ses preuves, coûtera des milliards de shekels, et ne devrait être fonctionnel qu'en 2011! Les habitants de Sdérot et des Kibboutz environnants n'avaient qu'à s'armer d'un peu de patience! Et d'ici là, les Palestiniens auront trouvé autre chose...
Le système Vulcan Phalanx
Le système Phalanx produit par la société américaine Raytheon, lui, est parfaitement opérationnel et peut être immédiatement mis en place. De plus il est relativement bon marché (8 à 15 millions $) et ses munitions aussi. Chaque missile lancé par "Iron Dome" coûtent de 30 à 50,000 dollars alors qu'un Kassam ne coûte presque rien!
En fait on a appris ensuite, bien après que le "Dome de fer" soit approuvé, qu'il ne pourrait pas protéger Sdérot car elle est trop proche de Gaza. On a envisagé de créer une zone tampon pour que les tireurs soient à la bonne distance... (Haaretz).
En fait on a appris ensuite, bien après que le "Dome de fer" soit approuvé, qu'il ne pourrait pas protéger Sdérot car elle est trop proche de Gaza. On a envisagé de créer une zone tampon pour que les tireurs soient à la bonne distance... (Haaretz).
Le système de défense rapprochée Vulcan Phalanx a été à l'origine mis au point pour la marine et donne satisfaction depuis plusieurs décennies. Sauf dans la dernière guerre du Liban lorsqu'une corvette porte-missile israélienne Saar-5 a été touchée par un missile. Mais le Phalanx n'avait pas été mis en route!
La version terrestre plus récente s'appelle le système C-Ram. La batterie se compose d'une mitrailleuse lourde à tir ultra-rapide (6.000 projectiles à la minute) couplée à un système radar. Une fois un missile détecté, les canons créent un rideau d’acier de balles volant à la vitesse d'un kilomètre par seconde - quatre fois plus vite qu’un Kassam. Selon les rapports américains le système est d'efficace à 80 % contre les missiles et obus de mortier.
Ce système est bien assez bon pour les États-Unis et les forces armées britanniques et canadiennes qui emploient le Phalanx pour protéger leurs bases en Irak et en Afghanistan. Mais le plus convainquant est que les américains s'en servent pour défendre toute la zone verte, la zone gouvernementale de Bagdad.
Le système terrestre C-RAM
Mais le ministre israélien voit les choses d'un autre oeil. Cela fait environ un an maintenant que des experts indépendants et des spécialistes de Tsahal avaient essayé de convaincre Ehud Barak. Cependant, l'idée a été constamment rejetée par le ministère de la défense.
Un autre spécialiste en balistique dont j'avais lu un article il y a quelques mois, le Dr. Nathan Farber, avait essayé de convaincre le ministère depuis longtemps, sans succès. Je m'étais dit alors les spécialistes du Ministère doivent savoir de quoi ils parlent...
L'explication officielle du rejet reste dans le flou: "après étude les experts ont conclu que le système ne satisfait pas les besoins de défense d'Israël contre des mortiers et des missiles Kassam".
Des sources au ministère ont ensuite expliqué que le système ne convient pas pour Sdérot parce qu'il ne peut protéger que des zones de quelques centaines de mètres carrés seulement.
Des sources au ministère ont ensuite expliqué que le système ne convient pas pour Sdérot parce qu'il ne peut protéger que des zones de quelques centaines de mètres carrés seulement.
On nous prend pour des imbéciles? La Green Zone de Bagdad à une surface de 10 km², ce n'est pas si petit! Et la base militaire de Zikim, près d'Ashkelon - où avant-hier encore un soldat a été blessé par un tir de mortier - elle est aussi trop grande pour être protégée? Et les kibboutz qui jouxtent la frontière?
D'après Uzi Rubin, un spécialiste des missiles et ancien responsable du Ministère de la Défense, quatre batteries C-RAM - pour 15 million $ pièce - pourraient défendre Sdérot de façon efficace contre les roquettes Kassam. Cela aurait pu être fait depuis des années. (Voir ce site militaire). Pour comparaison, le renforcement en béton des 8000 maisons proches de Gaza que le gouvernement a été contraint d'approuver il y a peu coûtera près de 100 millions $.
Un autre système américain qui a été rejeté est un système laser nommé "Skygard" de Northrop Grumman. 100% efficace, moins cher que le système de Rafael et pouvant être mis en place plus rapidement. Le ministère de la défense n'a pas daigné répondre aux propositions des américains.
Lorsque le directeur général du ministère de la défense décide l'année dernière d'aller voir sur place aux USA le système laser, "on" fait passer dans les médias israéliens une fausse information: la plupart des essais ont échoué. En fait il n'y a eu aucun essai et ne devait pas y en avoir. (omedia.co.il, aujourd'hui). Les défenseurs de l'industrie bleu-blanc sont vraiment très efficaces...
Lorsque le directeur général du ministère de la défense décide l'année dernière d'aller voir sur place aux USA le système laser, "on" fait passer dans les médias israéliens une fausse information: la plupart des essais ont échoué. En fait il n'y a eu aucun essai et ne devait pas y en avoir. (omedia.co.il, aujourd'hui). Les défenseurs de l'industrie bleu-blanc sont vraiment très efficaces...
Une batterie C-RAM a finalement été commandée aux USA pour la tester contre les mortiers et Kassams tirés depuis la bande de Gaza. Toutefois, on ignore quand elle arrivera en Israël. On raconte que le directeur général du ministère, Pinhas Buchris, aurait pris cette décision malgré l'opposition de plusieurs haut-fonctionnaires.
Le vaisseau Saar-5. Un missile chinois tiré par des experts iraniens l'a touché depuis la côte libanaise
Début mars, une délégation des fonctionnaires du ministère de la défense et des officiers de l'Armée de l'Air est allé aux USA évaluer le Phalanx. La délégation a conclu que "le système pourrait fournir au moins une réponse partielle à la menace venant de Gaza".
L’année dernière ce n’était pas suffisant?
Visiblement il y a d'autres raisons qui ont fait préférer le projet de Rafael malgré son coût.
Une première hypothèse est une mesure de rétorsion contre les américains qui ont refusé d'acheter le système israélien de protection active de blindés TROPHY produit par Rafael.
L'autre hypothèse est plus probable mais j'ai du mal à l'envisager: si le système C-RAM s'avérait suffisant pour contrer les roquettes Kassam, on risquerait de ne plus avoir besoin du Iron Dome et le gouvernement aurait du mal à justifier son achat. Et si au contraire celui-ci avait l'occasion de prouver son efficacité à protéger la population du Néguev Occidental, ce serait un argument de vente inestimable pour son exportation vers tous les théâtres de combat.
Ce qui me rend d'autant plus suspicieux - outre notre manque maintenant chronique de confiance envers la classe politique - est la façon dont les décisions ont été prises: parmi les membres du panel d'expert qui a approuvé le projet et lui a alloué un fond de recherche d'un milliard de shekels se trouvait Yedidya Ya’ari, un proche d'Ehud Olmert et PDG de Rafael Armements! (Haaretz).
Olmert avait nommé son ami Ya'ari dans la Commission Winograd qui a enquêté sur la seconde guerre du Liban. Le Conseiller juridique du gouvernement, Menahem Mazouz, a annulé sa nomination une semaine plus tard pour conflit d'intérêt. Rafael, en effet, est une compagnie gouvernementale, ce qui plaçait Ya'ari dans la dépendance d'Olmert.
L'opinion publique israélienne, écoeurée par les effluves nauséabondes des "affaires" que laisse Olmert dans son sillage, n'est pas encore vraiment au courant. Le mépris de la direction politique et militaire du pays pour sa population civile était patente durant la deuxième guerre du Liban. Ce nouveau scandale le confirme encore d'avantage.
S'il s'avère que la population de Sdérot subit depuis huit ans un des pires traumatismes qu'une population civile ait connu pour les intérêts du complexe politico-militaro-industriel, les réactions risquent d'être très dures.
S'il s'avère que la population de Sdérot subit depuis huit ans un des pires traumatismes qu'une population civile ait connu pour les intérêts du complexe politico-militaro-industriel, les réactions risquent d'être très dures.