2 mai 2010

Recyclage spatial

Je propose: base lunaire pour pas cher!


La Station Spatiale Internationale est maintenant complète. Plus grande qu'un stade de foot, lourde de 400 tonnes, elle aurait couté près de 160 milliards de dollars.

Et quel a été son intérêt scientifique? Quasi nul.

Il est vrai que l'ISS est télégénique. Sur le dernier vol STS-131, il y avait même trois astronautes de sexe féminin tout à fait charmantes:


Mais les différentes missions de la NASA ont surtout consisté à construire et entretenir le gros mécano. Autrement dit, elle est devenue son propre but!
Et au moment où nous avons enfin des preuves de l'existence de quantités significatives d'eau sur la lune, la NASA n'a plus de budget pour retourner sur notre satellite naturel et reporte l'ambitieux programme Constellation.

Pourquoi ne pas rapprocher ces deux données pour créer une solution ad hoc?

Voilà mon idée: puisqu'elle est déjà la-haut en orbite autour de notre terre, pourquoi ne pas pousser l'ISS sans effort vers la lune? Mise en orbite autour de la lune, l'ISS aurait déjà beaucoup plus à faire.

L'ISS photographiée en transition avec la lune

Il suffira ensuite de démonter les éléments de l'ISS un par un et de les descendre vers la surface. Et voilà, nous avons une base lunaire recyclée! Ça c'est un projet écologique, et économique en plus!
En outre, bien sûr, une base lunaire doit être parfaitement écologique et tout recycler. Les coûts de fonctionnement pourront être réduits en utilisant au maximum les ressources locales: eau, oxygène et minéraux tirés du sol, agriculture et élevage. Il s'agit de créer un écosystème entièrement nouveau. Les enseignements d'une telle expérience lunaire pourraient s'avérer extrêmement précieux pour notre crise écologique globale.
Et pas la peine d'attendre 2015, la date prévue pour la fin des programmes sur l'ISS.
De toute façon il faudra démanteler la station et la ramener sur terre, et cela aussi va revenir très très cher, alors que pour à peu près le même prix on la recycle sur la lune. Elle pourrait servir encore 30 ans selon les Russes qui s'y connaissent après avoir indéfiniment retapé leur MIR!

Le LEM d'Apollo 11 en 1969

Installés à l'ombre dans un cratère à l'abri des radiations du soleil, ou enterrés dans le regolithe pour se protéger aussi des micro-météorites, les modules de l'ISS permettront un séjour prolongé et sûr.

Mais il n'y a pas de raison d'arrêter là le recyclage: le télescope spatial Hubble arrive lui-aussi en fin de vie; rapatrié sur la base lunaire, il pourrait inaugurer un nouvel observatoire astronomique lunaire. Installé au sol sur la lune-ferme, son entretien sera des plus faciles!
Et puis il y a ce dépotoir de vieux satellites qui tournent si dangereusement en orbite autour de la terre. Autant de matériaux à récupérer pour la base lunaire. Il suffit d'un robot éboueur spatial faisant la navette terre-lune. Les détritus irrécupérables pourraient être enlunés dans un cratère profond. Pour ce qui est de l'aspect écologique didactique, l'exemple viendrait d'en-haut pour tous nos pollueurs de la basse terre!

Israël d'ailleurs devrait participer:
Puisque le monde entier crie au colonialisme quand des Judéens - c'est le sens du nom "juif" - construisent en Judée; puisque les réfugiés palestiniens, parqués génération après génération dans les camps libanais, sont privés de tout droit civil - Arabes traités plus mal que des étrangers dans un pays arabe - il est temps que le gouvernement s'intéresse à la colonisation de la Lune: Israël et la Ligue Arabe pourraient y envoyer des "colons" et des "réfugiés", symboliquement au moins, eux qui n'ont pas leur place ici-bas, et aussi pour leur ouvrir d'autres horizons...

Et pour rester en apesanteur:





4 avril 2010

Et Steve descendit de la montagne

Steve Jobs vient de révéler la tablette iPad, tel un nouveau Moïse apportant les Tables de la Loi au peuple.
Selon le Los Angeles Times c'est la table la plus attendue depuis la révélation au Sinaï!
Pourquoi ce qui n'est apparemment qu'un ordinateur de plus, soulève-t-il de telles passions et un tel lyrisme?

Cette métaphore Jobs/Moïse, iPad/Tables revient dans une bonne part de la presse américaine.
Personnellement, plutôt que les tables portant le texte gravé et immuable du décalogue, j'aurais choisi comme objet métaphorique le Pectoral du Jugement porté par Aaron, avec ses douze pierres précieuses (Ex. 28). Elles fonctionnaient comme un oracle divin pour donner la réponse aux questions posées par le grand-prêtre. 
Selon un midrash, les pierres précieuses s'illuminaient ou s'éteignaient d'elles mêmes comme douze icônes lumineuses, pour indiquer l'innocence ou la culpabilité. Voilà une idée d'application à développer, elle pourrait aider à désengorger nos tribunaux paralysés!
Et pas de doute, ce pectoral devait beaucoup ressembler à un iPad!






Descendant du sommet de la montagne  high tech, vers la Silicon Valley illuminée, sous le tonnerre des applaudissement et les éclairs des flashs, le prophète Jobs brandit au-dessus de la tête de ses fidèles la fascinante et hypnotisante table écrite du doigt du dieu numérique, en pur langage digital...

D'où vient un tel engouement?





Jobs a créé puis relancé la religion Apple. Il peut compter sur des foules d'inconditionnels de la firme à la pomme croquée, l'Eve tentatrice qui offre à tous les fils d'Adam le Fruit de la Connaissance.
Vous serez comme des dieux! Vous tiendrez l'éternité entre vos mains! proclame le iProphète.

Dès les débuts d'Apple, Steve Jobs avait compris l'importance d'une interface graphique intuitive et esthétique pour l'utilisateur non informaticien.
J'ai utilisé un des premiers Macintosh, et je me souviens de ma découverte du bureau virtuel avec une certaine nostalgie... La corbeille à papier, qui grossissait lorsqu'on y "jette" les documents et se vidait dans un bruit de papier froissé m'a tout de suite plu.
Windows a ensuite essayé de suivre, toujours avec un train de retard.
Depuis, toujours fidèle à la même logique, Apple à rendu virtuel une part croissante du hardware et des périphériques de l'ordinateur lui-même, jusqu'à ce qu'il se fasse simple écran: disparus touches, claviers et souris poussiéreux.
L'écran lui-même peut disparaître, remplacé par une caméra et un projecteur miniatures qui utilisent n'importe quelle surface. Puis, notre cortex lui-même formera l'ultime écran, nous immergeant parfaitement dans un monde digital devenu comme réel. Il ne restera plus qu'à nous downloader nous-même sous forme digitalisée pour vivre éternellement dans le cyberspace...

Selon sa biographie, depuis son enfance d'enfant adopté - comme Moïse - en passant par la méditation Zen, l'expérience du LSD, et jusqu'à la fondation de Pixar, Jobs a clairement une affinité avec les mondes virtuels et imaginaires.



L'iCône Jobs apporte le Livre des Livres, le livre qui contient tous les livres.
Ce miroir magique fait descendre les données cachées dans le cloud, la nuée de données et programmes qui désormais nous enveloppe en permanence et en tout lieu.
Le rêve de pouvoir accéder partout, à tout instant, à l'ensemble de toute la culture mondiale dans toutes ses langues et dans l'épaisseur de toute son histoire, le rêve d'une Révélation continue, semble à portée de main. L'esprit WIFI, G3, qui va bientôt porter sur ses ailes toutes les créations humaines digitalisées, ne demande qu'à être capté!
D'un clic j'achète musique, films, livres, et les consomme immédiatement, ou me fait livrer tout objet matériel.
Je ne suis jamais seul, communique partout et en permanence avec mes proches et amis dans le monde entier.

Il n'est pas nécessaire d'être un élu, un prophète ou un fils de prophète pour cela: tous peuvent saisir l'esprit informationnel sans la moindre formation.


Des millions de cerveaux humains, pris dans les mailles de l'hyper-réseau, prolongés par des prothèses intelligentes artificielles et agents robotiques, puisent avidement dans la masse des mémoires du cerveau global, celui de l'Homo super sapiens qui commence à émerger.
Un sentiment de toute puissance envahit l'utilisateur de l'écran magique. Pouvoir trouver sans effort réponse à question, objet qui comble son manque, est extrêmement jouissif.
Mais c'est là aussi que Jobs frappe: l'immédiateté de la jouissance est ce qui crée la dépendance, comme pour les drogues dures. Pour garantir cette immédiateté - qui est le secret de sa réussite - il n'hésite pas à sacrifier diverses fonctionnalités, comme le multitâche, les fenêtres multiples et Flash, pour préserver la vitesse d'accès maximale. Le client grogne, ce n'est pas grave, il est accro et en redemandera toujours.
Jobs joue de cette dépendance pour se faire dealer unique, sans concurrent. Il ferme son système aux autres fournisseurs de médias et ne laisse qu'un unique cordon ombilical relié au monde Apple des iTunes et Apple Store. Pas de port USB, pas d'accès aux fichiers de la mémoire. Il produit des foules de junkies et construit ainsi son Empire. Pas étonnant qu'il soit connu comme ego-maniaque selon son Wikipedia...

Steve Jobs est un anti-Moïse, qui au lieu d'affranchir, donner pouvoir et se retirer humblement en laissant un code de vie adulte, vend la jouissance régressive et provisoire d'un pouvoir dont il reste le maître absolu.


A lire, sur Kindle ou iPad, ou même sur papier!




31 mars 2010

Un nouveau Joseph?

L'Europe s'est finalement résolue à appeler le Fond Monétaire International au secours de la Grèce.
Depuis sa nomination en 2007, Dominique Strauss-Kahn a fait passer les ressources prêtables du FMI de 260 à 850 milliards de dollars. Le Fond est devenu ainsi un acteur incontournable de la finance mondiale.
Cette stratégie me rappelle un autre Grand Argentier, grand rêveur et interprète de rêves aussi: Joseph en Egypte.
Il a utilisé la même technique: accumulation de capital - montagnes de "blé" - pendant les années de "vaches grasses" pour traverser ensuite la crise - les "années de vaches maigres".
Avec la gente féminine, DSK n'a peut-être pas fait preuve de la même rigueur éthique que Joseph-le-Juste, qui résistât vaillamment aux entreprises de séduction de la femme de son employeur, Potiphar. Mais si l'on fait exception de ses affaires, au sein même du FMI, de relations avec une économiste (mariée) ou une stagiaire qu'il aurait favorisé, les deux hommes ont beaucoup en commun.

 

Joseph a été redoutable avec les paysans égyptiens (Genèse 47): en échange du blé salutaire, leur argent, leurs troupeaux, leurs terres, puis eux-mêmes devinrent propriété de Pharaon; ainsi naquit la première économie totalement planifiée et étatisée de l'histoire...
Les craintes des grecs évoquent aussi les dangers de ce système d'assurance. La politique passée du FMI, imposant en général des mesures d'austérité aux Etats en difficulté, explique ces craintes. Et DSK a annoncé hier que si prêt il y a, il sera accordé aux conditions posées par lui. Il promettait que le FMI pratiquerait désormais une politique de relance. A suivre...

L'incapacité de l'Europe à défendre seule la zone Euro révèle la faiblesse de sa construction et la force des égoïsme nationaux: il s'est avéré que les fourmis allemandes ne sont pas prêtes à payer pour les cigales grecques.

Le FMI manifeste l'avantage présenté par un organisme supranational indépendant des Etats. Il montre que seul un organisme de ce type pourrait régler un autre problème majeur mondial - la crise climatique globale - en s'imposant aux Etats de l'extérieur.
DSK a annoncé récemment vouloir élargir le mandat du FMI pour lui permettre de prévenir les crises économiques mondiales. S'il gagne ce pari, la voie sera ouverte vers une gouvernance économique mondiale, et à plus long terme, qui sait, vers un gouvernement mondial.

Pour creuser un peu:








4 mars 2010

Le conflit israélo-palestinien prévu par le Talmud?


Je dois au Rav Léon Ashkenazi - Manitou - lors d'un cours à "Maayanot", d'avoir remarqué l'importance de ce passage extraordinaire du Talmud Sanhédrin 98b.
Le texte discute de la période qui précèdera la venue du Messie, marquée par les souffrances de son enfantement.
Voici d'abord ma traduction:

Ula a dit: Qu'il vienne et que je ne le vois pas. (c'est-à-dire, sa venue sera précédée de telles catastrophes qu'il vaut mieux que je ne les vive pas!) Et de même a dit Rabba: Qu'il vienne et que je ne le vois pas.
Rav Yosef a dit: Qu'il vienne et que j'ai le mérite de m'asseoir à l'ombre des crottes de son âne.
Abbayé répondit à Rabba: Pour quelle raison [as-tu des craintes]? Si tu dis que c'est à cause des souffrances de l'enfantement du Messie, n'a t-on pas enseigné: Les disciples de Rabbi Eleazar lui ont demandé: Que doit faire un homme pour échapper aux douleurs de l'enfantement du Messie?
- qu'il s'occupe de Tora et de charité.
Et toi Maître, tu possèdes et Tora, et charité!
Il répondit: Je crains les conséquences de la faute (ma Tora et mes bonnes actions pourraient ne pas être suffisantes). Comme l'a dit Rabbi Yaaqov bar Idi, car Rabbi Yaaqov bar Idi objecta [d'une contradiction entre les versets]: Il est écrit: "Et voici, je suis avec toi et je te garderai partout où tu iras" (Gn. 28, 15) et il est écrit: "Et Yaaqov fut pris d'une grande crainte et fut angoissé" (Gn. 32, 8) - c'est qu'il craignait les conséquences de la faute. Ainsi qu'il a été enseigné (sur le verset Ex. 15, 16): "Jusqu'à ce que ton peuple passe" - il s'agit de la première arrivée (à l'époque de Josué), "ce peuple que tu as acquis"  - c'est la deuxième venue (au retour de l'exil de Babylone). Je dirais donc: Israël méritait qu'on leur fasse un miracle lors de la deuxième venue comme à la première, mais c'est à cause de la faute.
Et de même a dit Rabbi Yohanan: Qu'il vienne et que je ne le vois pas.
Et Reish Lakish lui a répondu: Pour quelle raison? Si tu dis que c'est parce qu'il est écrit : "lorsque qu'on fuira de devant le lion et qu'on est rejoint par l'ours, puis qu'on arrive à la maison et qu’appuyant la main contre le mur on est mordu par le serpent" (Amos 5, 19), viens, je vais te montrer un exemple de cela dans ce monde-ci: lorsqu'on va à son champ et qu'on est rejoint par l’arpenteur (qui exige le paiement des taxes), c'est comme si on est rejoint par un lion, puis on entre en ville et on est rejoint par le collecteur des impôts, c'est comme si on est rejoint par un ours, on rentre à la maison et trouve ses fils et filles affamés, c'est comme si on est mordu par un serpent.
Non, c’est parce qu'il est écrit : "Enquerrez-vous de grâce et voyez, est-ce qu'un mâle enfante? Pourquoi ais-je vu tout homme avec ses mains sur ses flancs, comme la femme qui enfante, et tous les visages atteint de jaunisse?" (Jer. 30, 6). Que signifie "J'ai vu tout homme (gever)" Rava bar Yitshak a dit au nom de Rav: Celui qui possède toute bravoure (gevura; Dieu, donc). Et qu'est-ce que signifie "tous les visages sont atteints de jaunisse"? Rabbi Yohanan a dit: La cour d'en-haut et la cour d'en-bas, au moment où le Saint, béni soit-Il, a dit: Ceux-ci (Israël) sont l'oeuvre de mes mains et ceux-là (les Nations) sont l'oeuvre de mes mains, comment perdrais-je ceux-ci devant ceux-là?
Rav Papa a dit: C'est ce que dit le proverbe populaire: le taureau a couru et est tombé, on va chercher le cheval et on le met dans son étable (à sa place).

Le passage se termine là, par cette parabole mystérieuse, sans apporter la solution qui permettait d'échapper à cette époque de souffrances.
Il est surprenant a priori de voir que des maîtres souhaitent personnellement ne pas voir la venue du Messie, même s'ils prient chaque jour pour elle. Qu'a de si terrible l'époque de cette venue?
Nous apprenons toutefois que si l'on doit craindre l'époque de la venue du Messie, ce n'est pas à cause des troubles sociaux et crises économiques, puisque cela peut être réparé par la confiance que donnent l'étude de la Tora et le bien fait à son prochain ; c’est peut-être parce que nous sommes pêcheurs, mais ce n'est pas à cause des souffrances et des catastrophes qui s'abattrons sur tous, les unes après les autres, sans laisser de répit et sans qu'on puisse trouver un refuge, même dans sa propre maison: cela existait déjà à l'époque de Rabbi Yohanan et Reish Laqish, sous l'occupation romaine, lorsque les romains pressuraient la population par l’intermédiaire de leurs collecteurs d'impôt, la crise économique et la famine qui s'en suivait pouvaient aussi bien déjà annoncer la venue du Messie.
Non, c'est à l'époque où chaque homme sera pris de douleur comme la femme qui accouche, époque où un insoluble dilemme étreindra le Ciel et les hommes.

Le Rav Adin Steinzaltz explique: "Ceux-ci sont l'oeuvre de mes mains et ceux-là sont l'oeuvre de mes mains, comment perdrais-je ceux-ci devant ceux-là? Viendra une époque à laquelle il semblera que pour le Saint-béni soit-Il il n'y a plus de différence entre Israël et les Nations; et c'est pour cela qu'il faut craindre les douleurs de l'enfantement du Messie."
Mais pourquoi se présentera une telle situation de "eux ou nous", où nécessairement l'un des deux partis doit être éliminé pour que l'autre vive? C'est ce que vient expliquer le proverbe, qui se fait parabole: lorsque le taureau - Israël - que le Maître - Dieu - aime particulièrement, tombe, Il met à sa place le cheval - les Nations - et lorsque le taureau guérit, un jour ou l'autre, de sa chute, il lui est difficile - explique Rachi - de sortir le cheval pour remettre le taureau dans son écurie, après l'y avoir placé auparavant. Rachi explique que lorsque le Saint, béni soit-Il, voit la chute d'Israël, il donne sa grandeur aux Nations, et lorsqu'Israël fait retour et est sauvé, il lui est difficile de perdre les idolâtres devant Israël.

Nous précisons, quant à nous, ce que représente l'étable: la Terre d'Israël, occupée par Rome puis par les Arabes et les chrétiens. La chute d’Israël n’est pas seulement morale, mais Exil et souffrances, et la repentance, la Rédemption, est aussi retour géographique de l’Exil vers la Terre d’Israël.
Le « don de la grandeur d’Israël aux Nations » est une façon de rendre compte des revendications chrétiennes et musulmanes d’être la religion vraie et le nouveau peuple élu. Ce qui ne semble qu’une prétention humaine, d’un point de vue lui aussi humain et polémique, s'avère relever du dessein divin.
Mais cette revendication religio-idéologique a aussi eu son pendant politico-territorial : la conquête des lieux saints, signe qu'on est l'Elu. La “Terre Sainte” a été alternativement occupée par les monothéistes concurrents du judaïsme, les musulmans (califats, empire ottoman) et les chrétiens (Croisés, Britanniques), avant de revenir aux Juifs.

C'est le nœud du problème, les uns n’ont pas moins de droits à cette terre que les autres. Leurs mérites sont apparemment égaux: Les Nations, en l’occurrence les Arabes palestiniens, musulmans et chrétiens, ne peuvent plus être appelés « idolâtres » justement, ils sont tout aussi monothéistes que les Juifs, et servent le même Dieu (ou plutôt s'en servent) ; d’où ceux-ci tireraient-ils un droit particulier? D’autre part, les Juifs n’ont eu de cesse d’être « comme tous les peuples », et de se libérer eux-mêmes en créant un État-Nation comme l’ont fait tous les peuples décolonisés, et comme voudraient le faire les Arabes palestiniens. Juifs et non-Juifs sont donc indiscernables quant à l’élection et aux droits ; si les Nations se sont rapprochées d’Israël par le monothéisme, Israël les a ensuite rejoint dans l’athéisme nationaliste. Dieu en a mal au ventre, et nous aussi. Et telles les contractions de la femme enceinte qui se renforcent et se font de plus en plus rapprochées, le conflit va devenir de plus en plus violent et intense, et de la matrice moyen-orientale, gagner le monde entier. L'enfant va naître - la mère va-t-elle survivre?

Si en haut - les Princes des Nations - et en bas - les chefs politiques - tous sont pareillement étreints par les douleurs de l’enfantement sans ne savoir que faire, c’est que la solution ne sera ni religieuse, ni politique. Rien de ce qui existe présentement dans les domaines religieux et politiques ne peut servir à résoudre ce problème: ni retour au judaïsme ou à l’islam, ni partage territorial pour créer un nouvel État-Nation, ni État binational, ni confédération ou fédération classiques… seulement une création nouvelle qu'il nous faut inventer.
Mais une question s’impose : comment les sages du Talmud, qui ne prétendaient pas être prophètes, ont-ils pu prévoir ce conflit plus de quinze siècles à l’avance, ainsi que son caractère dramatique? Si une révélation prophétique n’en est pas la cause, c’est qu’ils détenaient les clefs d’une logique de l’histoire qui nous échappe. C’est celle-ci que nous essayons de retrouver, pour finir par décrire les grandes lignes d’une solution originale, qui trouve aussi ses fondements dans le droit talmudique.

Mais dès lors qu'est claire la portée messianique de ce conflit, il devient possible d'en deviner le sens au lieu de se laisser posséder par lui et par les haines qu'il suscite. Au lieu d'apparaître comme dangers de destruction mortelle, les souffrances actuelles - comme les douleurs de l'accouchée - annoncent la création d'une vie nouvelle et en deviennent plus supportables...

30 décembre 2009

Statistiques politiquement incorrectes... et trompeuses

Comme chaque année, le Bureau Central de Statistique publie ses dernières données démographiques. Selon lui, la population d'Israël est estimée en date du 31 Décembre 2009 à 7,5 millions d'habitants, dont environ 5,7 millions sont juifs (75,4% de la population), 1,5 million arabes (20,3%) et 319.000 définis comme "autres" (chrétiens non-arabes et habitants sans classification religieuse, 4,3%).

Mosquée Hassan Beck - Tel-Aviv

Ces distinctions ne sonneront pas politiquement correctes pour des oreilles françaises, mais dans notre pays pluriel et multiculturel, cela n'a rien de choquant.
Le problème est ailleurs, dans ce qui n'est pas dit: le Bureau ne précise pas que sont comptés parmi les Juifs environ 300.000 résidents des implantations de Cisjordanie (alias "Territoires", "Territoires disputés", "Territoires occupés") - citoyens, bien que résidents hors du territoire national - et que ne sont pas comptés les Arabes de Jérusalem-Est - non-citoyens, mais résidents dans le pays tel qu'il est défini par la loi israélienne - non plus que les Arabes de Cisjordanie et de la bande de Gaza, à la fois non-citoyens et hors des frontières politiques. Ne sont pas comptés bien sûr les travailleurs émigrés - particulièrement nombreux, légaux ou illégaux - et réfugiés soudanais, ainsi que leurs enfants, même ceux nés dans le pays, et qui vivent tous sur le territoire israélien.
Les données sont approximatives, étant donné que nombreux sont ceux qui ne remplissent jamais un formulaire de recensement, Arabes ou Juifs orthodoxes.
Tous les cas de figure sont représentés! Telle est la réalité brute, qui n'est pas reflétée par les données statistiques officielles.

135.000 personnes se sont ajoutées cette année à la population israélienne (1,8%). Les juifs devraient arriver au chiffre - oh combien symbolique - de 6 millions aux environs de 2012.

Israël + territoires, au total, match nul!

Le statut des "colons" est particulier: ils font partie intégrante de la population israélienne, mais les Territoires où ils habitent n'ont pas été annexés à l'Etat d'Israël. C'est pourquoi politiquement (et juridiquement me semble-t-il) ils ne peuvent être simplement qualifié d'"occupés"; une partie d'entre-eux est détenue sous contrôle militaire israélien, une autre est sous administration palestinienne autonome, mais ils ne font pas partie du territoire israélien et la loi israélienne n'y est pas appliquée.

Tel-Aviv / Sakhnin - le foot rapproche parfois!

Les habitants arabes de Jérusalem-Est ont un statut pas moins particulier: ils vivent dans une zone annexée au territoire israélien et ne sont pas citoyens de l'Etat; ils détiennent toutefois une carte d'identité israélienne  qui leur garantit la protection sociale des citoyens. Ils peuvent obtenir la nationalité mais ne le font pas pour la plupart. Ils peuvent voter aux élections municipales de Jérusalem ainsi qu'aux élections nationales palestiniennes, mais s'abstiennent  généralement dans les deux cas.
L'un d'entre-eux a qui j'ai demandé pourquoi il ne prenait pas la nationalité israélienne m'a expliqué qu'il préférait garder son passeport jordanien: il ne perd rien de ses droit sociaux et peut voyager librement dans les pays arabes et visiter sa famille en Jordanie.

Les habitants non-juifs d'Israël jouissent de droits de citoyenneté complets, bien que, ou étant donné que, l'Etat est défini comme "juif et démocratique".
La nationalité arabe palestinienne des citoyens arabes n'est donc pas reconnue, mais ils possèdent une autonomie culturelle et linguistique entière. L'arabe est deuxième langue officielle de l'Etat avec l'hébreu, et tous les documents officiels, la monnaie, les panneaux de la route et noms de localité sont en principe écrits dans les deux langues. Sans être politiquement un Etat binational, la binationalité est partout présente. Alors l'Etat d'Israël s'appelle officiellement aussi bien دَوْلَةْ إِسْرَائِيل que מְדִינַת יִשְׂרָאֵל.

Face au chiffre de 20% de citoyens israéliens arabes (donc Palestiniens de leur point de vue), dont le pays s'accommode relativement bien, on ne voit pas trop pourquoi un futur Etat palestinien devrait être "pur" de tout juif. Pourquoi les Juifs ne pourraient-ils pas jouir par exemple d'une double-nationalité?


Et on voudrait faire de tout cela deux Etats-Nation homogènes bien définis!

Une solution originale et créative est nécessaire. Avec une peu de bonne volonté et d'imagination - même si ce sont des denrées rares - rien ne devrait être impossible.

Yes, There must be another way!


Et en prime un livre très instructif

22 décembre 2009

Pour ne pas diviser Jérusalem/Al Quds

L'Europe demande le gel des constructions israéliennes à Jérusalem-Est. Jérusalem doit devenir "la future capitale de deux Etats, Israël et Palestine." Une capitale unique pour deux Etats, ou deux capitales, qu'ont voulu dire les européens?
A-t-on jamais vu une ville capitale de deux Etats qui ne serait pas divisée comme l'étaient Berlin ou  Nicosie? Surtout quand le futur Etat palestinien est lui-même divisé entre une entité islamiste (Gaza) en guerre terroriste ouverte contre Israël, et que l'autre (Cisjordanie) n'est qu'en guerre larvée car militairement contrôlée par l'Etat hébreu. La "solution" européenne mènerait fatalement à revenir à la partition de la ville, comme avant 1967 lorsqu'un mur la traversait de part en part en plein coeur. Et de toute façon une partition physique est impossible tant il y a aujourd'hui de quartiers juifs à l'Est, sans mentionner l'Université! Les Juifs sont aujourd'hui majoritaires à Jérusalem-Est...

L'intrusion européenne dans nos affaires, c'était trop, évidemment, pour le site Juif.org, qui a encore frappé:

Israël appelle l'UE à partager Bruxelles

"Les ministres israéliens ont choisi de rester flous dans la définition d'un futur État flamand. Israël appelle l'Union européenne à partager Bruxelles comme capitale conjointe de deux États wallon et flamand, dans un appel urgent à la négociation lancé mardi par les ministres israéliens.


Au risque de braquer Baroso et les partisans de l'unité de la ville sous férule belge, les ministres israéliens assurent qu'ils «ne reconnaîtront aucun changement autre que négocié». La seule voie d'une paix véritable est une négociation «pour résoudre le statut de Bruxelles comme future capitale de deux États», écrivent les ministres dans leurs conclusions"... Lire la suite du pamphlet de Michel Garroté

J'aime bien polémiquer avec ce site, la clareté est toujours plus lumineuse sur fond obscur!
La situation belge est bien sûr très différente: Wallons et Flamands jouissent des droits de citoyenneté égaux dans un même Etat; les Palestiniens de Jérusalem-Est n'ont pas la citoyenneté israélienne. Les quartiers juifs ont poussé comme des champignons depuis 67, pas un quartier arabe n'a vu le jour.
L'article ne propose aucune alternative. Mais au-delà de la stérile et puérile réponse du berger Israël à la bergère Europe, la comparaison avec la Belgique est intéressante. Allons jusqu'au bout:

Pour ne pas avoir à diviser notre capitale en deux alors que nous vivons nous-aussi une réalité binationale et bilingue, adoptons le modèle belge!
- création de trois Etats : un Etat juif, un Etat arabe et un Etat fédéral israélo-palestinien qui chapeaute les deux.
- définition d'un statut particulier pour la capitale fédérale, ville mixte qui dispose de son propre parlement.
- un roi souverain sur la fédération comme Albert II de Belgique, à la différence qu'ici le souverain sera supranational puisque Juifs israéliens et Palestiniens sont deux nations différentes. L'unique souverain commun personnifiera l'alliance fondatrice de l'union fédérale et s'appelle dans nos traditions Ribono shel olam/Rabb al alamin - le Souverain du monde. Parce que supranational, il fera régner la Justice et la Paix de sa Loi.
C'est la seule façon de garder une Jérusalem à la fois une, ouverte et multiple.
Commençons donc par faire aussi bien que les Belges, et nous finirons par faire mieux!

Pour plus de détails:

http://vudejerusalem.blogspot.com/2009/08/israel-etat-juif.html

Et en musique!









Et quelques livres:



















15 décembre 2009

La Halakha oui, mais en quel Etat?

Le ministre de la Justice, Yaacov Nééman a déclaré la semaine dernière dans un congrès sur le droit hébraïque: "La Torah contient une solution complète à toutes les questions auxquelles nous faisons face", "Il faut faire des lois de la Torah le droit contraignant dans l'Etat d'Israël. C'est la bonne façon de nous restituer les lois de la Torah - pas après pas.”
Ce pavé dans la mare, lancé en plus par le plus haut responsable du système juridique, a fait des vagues.

Les rabbins ont applaudi, mais la plupart des réactions dans les médias - reflétant le consensus laïc majoritaire - a été de crier "la démocratie en danger" et d'agiter l'épouvantail d'un Etat de la Halakha, un "Etat talibanique"! C'est le cas de cet article du journal Maariv traduit ici en français.

Un article d'un blog publié sur plusieurs sites juifs francophones défend l'opinion contraire: selon son auteur, Bertrand Ramas-Muhlbach,  il serait souhaitable de fonder le droit israélien sur la Halakha (la loi rabbinique dérivée du Talmud). Cet article mérite d'être lu car il reflète l'opinion de nombreux israéliens religieux et sionistes modérés qui pensent qu'il suffirait d'ajouter un peu plus de religion, de lois inspirées du droit hébraïque, pour obtenir un parfait "Etat juif".
J'ai répondu à cet article et je reprends ici ma réponse:

Non, prendre la Halakha comme source du droit israélien n'est pas nécessairement une idée saugrenue, de prime abord, mais ce serait une révolution dont l'auteur de cet article ne semble pas mesurer toute l'ampleur.
Il écrit: "La Thora et la Halakha ne s’opposent donc en rien à la démocratie ".
Elles ne s'opposent pas toujours dans le détail de leur contenu, tel que la liberté d'expression (mahloket) ou l'éthique, c'est vrai.
Mais Thora et démocratie sont totalement incompatibles dans leur principes fondateurs: "démocratie" signifie "pouvoir du peuple", que toute souveraineté relève du peuple, que sa volonté est fondement du droit.
"Souveraineté du peuple" veut dire que le peuple ne reconnaît aucun autre souverain au-dessus de lui-même, aucune loi transcendante. La démocratie est autonomie et rejette toute hétéronomie.
La Torah, la Halakha, sont fondées sur le principe inverse: Dieu est l'unique souverain et source du droit. Il s'est donné un peuple en le faisant sortir d'Egypte. Il a choisi des hommes sans aucun pouvoir propre, des esclaves, pour que de serviteurs de Pharaon ils puissent devenir directement et immédiatement Ses serviteurs à Lui et à nul autre.

Les conséquences de ces deux approches sont elles-aussi totalement opposées:
- dans l'Etat démocratique, non juif dans ses fondements comme l'est Israël aussi, le droit est le moyen d'assurer l'existence de l'Etat et de la cohésion sociale. En cas de danger pour l'Etat, toute loi ou constitution peut être abolie et remplacée par une autre: l'indépendance du peuple sur sa terre prime tout, c'est "la Raison d'Etat".
- dans un Etat juif, un Etat halakhique, c'est le contraire: la terre est donnée afin que le peuple y fasse régner D. Si la Loi transcendante est rejetée, l'Etat n'a plus de raison d'être.

Jadis, les couronnes de la Torah n'étaient pas qu'un symbole

Comme le prévient le Shema, le peuple sera dispersé s'il rompt l'Alliance.

Il y a beaucoup d'autres conséquences incompatibles avec la démocratie parlementaire. Entre autres: pouvoir législatif qui n'est en fait que juridique (d'interprétation de la Loi) et réservé à des spécialistes, les rabbins; juges qui seront pour la plupart des rabbins; différentes catégories de citoyens inégales devant la loi: femmes, étrangers...; les personnes juridiques morales - sociétés anonymes, associations, Etats, corps d'Etat et administrations - n'existent pas dans la Halakha, mais seules les personnes humaines associées (shoutafim); la propriété ne peut être que privée, la personne "Etat" ne peut être une entité reconnue et donc ne peut être propriétaire de terres; les hiérarchies administatives n'existent pas non plus, il n'y a que des délégués (shlihim) qui reçoivent mandat des seuls citoyens mâles et majeurs pour une mission donnée. Ces délégués doivent impérativement être des juifs (benei brith, membres de l'Alliance). Mais ces domaines civils de la loi rabbinique sont ignorés des yeshivot et des rabbins, ce qui fait qu'ils ne sauraient pas comment faire fonctionner un Etat vraiment juif. Il leur faudrait étudier le droit constitutionnel, les sciences politiques et la théorie juridique de l'Etat pour comprendre la position halakhique sur ces questions. Commençons donc par faire le travail théorique! Lorsque l'auteur conclue "rien n’interdit d’admettre progressivement la Thora et la Halakha dans le système social israélien" il démontre qu'il n'a pas même commencé à s'y atteler. L'application de la loi juive métamorphoserait toutes les structures sociales du pays.

La Halakha peut évoluer dans son contenu - égalité des femmes (dans la différence), droits des non-juifs, musulmans et chrétiens, (intégrés dans l'Etat juif ou associés en fédération?) etc. - mais elle ne changera pas dans ses principes. L'introduire progressivement dans le droit étatique israélien, comme le proposent le ministre Nééman et à sa suite l'auteur de cet article, serait trahir la Halakha dans ses fondements et la dénaturer.

Dans un Etat-Nation ne peut exister qu'un seul peuple souverain. L'Etat d'Israël actuel n'est juif que de façon symbolique, il est démocratique dans ses fondements et tout citoyen, quelque soit son appartenance religieuse et "ethnique" est l'égal des autres devant la loi. La Halakha a déjà un pouvoir juridictionnel dans le domaine du statut personnel, mais elle ne détient ce pouvoir que de la bonne volonté du législateur laïque, la Knesset. Il en est de même pour la Shaariya qui règle le statut personnel des musulmans d'Israël et pour les tribunaux confessionnels chrétiens. Toutefois, la définition d'Israël "Etat juif" fait déjà problème et interdit aux citoyens non-juifs de se sentir des citoyens à part entière pleinement chez eux.

Nééman parle de faire de la Torah la Loi dans l'Etat d'Israël. L'Etat, pour lui, n'est donc pas remis en cause dans sa nature d'Etat-Nation et reste le cadre global au-dessus de la loi elle-même. Cela reviendrait à mettre une législation juive, la Halakha, au service du nationalisme juif et de son Etat-Nation souverain, ce qui en ferait une législation raciste, soumettant les non-juifs au pouvoir des juifs. Il n'y aurait pas de plus grande profanation de la Torah et tout serait alors perdu.
Les grandes religions monothéistes issues du judaïsme - le christianisme et l'islam - ne peuvent être traitées dans le cadre des catégories de la Halakha qui s'adressaient aux païens: étrangers résidents, noachides, idolâtres. Inversement, les deux religions-filles doivent elles aussi reconnaître leur dette envers la religion-mère d'Israël et renoncer à leur désir de la soumettre ou de la faire disparaître par conversion ou par les armes.
Car finalement, c'est là qu'est tout l'enjeu: apprendre à faire place à l'autre, à l'étranger.

Reconnaître le Souverain du Monde comme souverain supranational unique et exclusif - comme le fait fondamentalement la Halakha - permettrait au contraire aux différentes nations monothéistes d'Israël d'être reconnues dans leur identité nationale et de vivre sur un pied d'égalité: soumis et alliés au même Souverain, mais indépendants les uns des autres, Juifs, Musulmans et Chrétiens pourraient former alors l'alliance des tribus fédérées d'un nouvel Israël. J'ai décrit dans un post précédent Israël Etat juif? à quoi pourrait ressembler cette fédération.
La Halakha au sens strict ne concernerait que l'Etat juif dans la fédération israélo-palestinienne; dans ce cadre fondamentalement égalitaire, la Halakha pourra reprendre sa marche antique et redevenir ce qu'elle a été au cours des siècles: le système de droit le plus avancé de son époque.

Il ne faut pas se voiler la face: si on ne trahit pas la Halakha dans ses principes, fonder le droit d'un Etat juif sur elle sera une révolution totale qui ne laissera rien subsister de l'Etat d'Israël actuel.
J'appelle cette révolution de mes voeux.

Petite bibliographie, pour y comprendre quelque chose





Benamozegh, à lire absolument!







1 décembre 2009

Vive la crise!

Enfin une information sur le climat qui fait plaisir:

Baisse des émissions de CO2 en 2009, selon l'Agence internationale de l'énergie (AIE). Les émissions mondiales de dioxyde de carbone (CO2) diminueront d'environ 2,8% cette année, soit leur plus forte baisse depuis une quarantaine d'années!


Mais pourquoi n'en parle-t-on pas plus? Qui a peur de le dire tout haut: la crise économique, pour l'instant, nous sauve de la catastrophe. Nous risquerions peut-être d'en déduire qu'il faut qu'elle se poursuive! Oserons-nous blasphémer contre Sainte Croissance?
D'après une étude d'économistes britanniques, si la récession se poursuivait à son niveau actuel, les émissions de gaz à effet de serre dans le monde seraient de 9 % inférieures aux prévisions pour 2012. Cela nous donnerait 21 mois de sursis avant d'atteindre le seuil des deux degrés de réchauffement jugés dangereux. Et si la crise s'aggravait au point de celle de 1929 ce seraient 23 % et cinq ans qui seraient gagnés.
Selon Terry Barker, directeur du Centre de recherche sur le changement climatique à l'université de Cambridge, les émissions de CO2 avaient chuté de 35% entre 1929 et 1932, en pleine crise économique. Pour se faire une idée, les émissions mondiales de gaz à effet de serre ont bondi de 50% depuis 1970. Nous sommes loin du compte, mais le mal et son remède restent du même ordre de grandeur!

Bien sûr, si les niveaux d'émission reprennent ensuite leur niveau d'avant la crise, ce n'est que reculer un peu pour mieux sauter. Mais cela n'est pas obligatoire. A nous de changer nos comportements.
C'est là que se trouve l'extraordinaire opportunité de révolution économico-écologique offerte par la crise: elle nous donne un répit pour réfléchir, prendre conscience, développer les techniques nécessaires à un développement durable.
La croissance n'est pas mauvaise en soi, tout dépend de quel type de croissance il s'agit: elle pourra redémarrer, oui, mais selon un paradigme nouveau, celui d'une croissance "verte", non polluante, et surtout qui ne modifie pas la composition de l'atmosphère terrestre.

Mais on dit un peu partout dans le monde que la crise est passée maintenant, que la reprise a commencé.
Je m'inquiète vraiment. Dites-moi que non, dites-moi qu'une hirondelle ne fait pas le printemps, que c'est juste l'effet de la perfusion massive d'argent frais dans les veines du monstre!
De fait, aux dernières nouvelles, le chômage augmente encore aux USA et atteint maintenant 9,8%. Le dollar ne cesse de plonger; les chinois, les saoudiens et les autres s'aperçoivent que leurs réserves de devises ne sont que des montagnes de monnaie de singe, Dubaï est en faillite, ses richesses étaient aussi artificielles que ses îles...

Ouf, ce n'est peut être pas fini! C'est que la crise est notre seul espoir! Elle seule est en mesure actuellement de stopper, ou au moins ralentir, la surchauffe mondiale.

En effet, la baisse de la consommation mondiale signifie moins de production industrielle et agricole, moins de déplacements (travail, business, loisir, tourisme), moins de construction, moins de déforestation... donc au total moins de CO2 et de méthane émis.

Bref moins de tout va dans le sens des écologistes radicaux et ce, beaucoup plus vite que prévu... Pourtant, les verts apparaissent craindre que la crise économique et financière ne décourage les investissements dans les énergies durables. Ne devrions-nous pas au contraire les voir se réjouir de cette crise bénie?
Difficile à l'admettre, mais la récession s'avère nécessaire pour nous sevrer de notre dépendance envers les combustibles fossiles.

Il y n'a pas si longtemps, le débat "pour ou contre la croissance" agitait les milieux écologistes et politiques. La crise financière l'a rendu soudain obsolète: son objet, la croissance industrielle mondiale, a disparu.
Ce brutal coup de frein à la production industrielle est le bienvenu, il apparaît presque providentiel, au vu de l'imminence de la catastrophe écologique globale. C'est incroyable, comme dans un film, comme si juste à la veille de l'explosion de la machine une "main invisible" avait ouvert les vannes du circuit de vapeur surchauffé...

C'est le caractère "providentiel" de cette crise, trop beau pour être dû au hasard, que je veux examiner ici. Est-ce une autre main invisible, plus forte que celle du marché, qui nous a sauvé momentanément?
Comment pourrait-on expliquer un lien entre crise économique et crise climatique?

Je laisse les interprétations surnaturelles aux prêcheurs en tout genre qui ne manqueront pas d'exploiter le filon apocalyptique. Les résonnances bibliques ne manquent pas: le texte du shema met en garde du lien direct entre "pluies en leur temps" et respect de la loi divine; sa transgression est sanctionnée du Déluge purificateur, des destructions de la Tour de Babel, de Sodome et Gomorrhe, avec au bout la fin du monde.

La question sera: y-aurait-il malgré tout un lien de causalité rationnelle entre les deux sphères apparemment indépendantes de la moralité financière et de l'écosystème planétaire? Peut-il y avoir un rapport entre un phénomène social et un autre climatologique?
Si lien il y a, c'est chez l'homme, bien sûr, qu'il faut le chercher.

On s'accorde pour dire que la cause de la crise des subprime réside dans l'irresponsabilité généralisée des acteurs économiques: irresponsabilité du consommateur encouragé à rêver éveillé le "rêve américain" sans qu'il en ait les moyens; irresponsabilité des banquiers encouragés "à faire du chiffre" et à accorder le plus possible de crédit à des débiteurs dont ils ne vérifient pas la solvabilité; produits financiers opaques et abstraits qui permettent de dissimuler les dettes insolvables et les faire passer de mains en mains...
Le résultat est que la dette des ménages américains a doublé entre 2001 et 2008, pour atteindre 14000 milliards de dollars. Le ménage américain moyen détient 13 cartes de crédit!

C'est toute une culture de consumérisme, de gratification et profits immédiats sans effort qui est en cause, une culture commune aux consommateurs et à ceux qui les ont financé. Tous ont "tiré des plans sur la comète", vendu la peau de l'ours avant de l'avoir tué", comme dirait la sagesse populaire. C'est cela "vivre à crédit", tenir pour assuré un gain futur. Quelle vanité!
Mais que l'on ne nous assène pas non plus ces formules moralistes qui jettent l'opprobre sur "la cupidité", ou "l'appât du gain" des banquiers: ce serait faire fausse route et se priver de la possibilité de reprendre le bon cap. Il n'y a pas de mal à vouloir gagner de l'argent. Sans le désir de richesse, cette passion pour certains, l'économie ne tournerait pas et la pauvreté serait générale. Tout dépend comment l'argent est gagné. Le Talmud parle de "masa u-matan be-emuna", soit: "transactions en confiance, en foi". Sur cela tout d'abord, dit-il, nous serons jugés en arrivant au ciel. Car c'est le test ultime, et le plus difficile: tenir compte de l'intérêt de l'autre comme du sien propre et ainsi cesser de se faire un dieu. "L'argent honnête", pour le dire vite.
L'imprudence, l'impatience, la malhonnêteté, le mensonge, ce sont eux qu'il faut dénoncer. Ce sont eux qu'une règlementation sage doit prévenir.
Leur sanction s'est traduite par une crise du crédit, une crise de confiance généralisée.
Le crédit, la confiance, ce sont les composantes horizontales, laïques, de la foi religieuse verticale. L'économie, c'est-à-dire les échanges entre producteurs et consommateurs, exige la croyance réciproque. La crise est fondamentalement crise de foi en ce dieu du "In God we trust" proclamé par les billets verts et qui fait toute leur valeur.

Or il s'avère que ce comportement irresponsable est exactement le même dont nous faisons preuve envers toute la planète: nous exploitons ses réserves plus vite qu'elles se renouvellent, nous polluons plus qu'elle ne peut digérer, nous consommons plus que ce qu'elle peut donner.
Là-aussi nous vivons à crédit et repoussons les échéances sur les générations à venir. Eux paierons pouvions nous croire il y a quelques années, mais voilà, salutairement, nous sommes déjà en train de payer!

C'est donc clair, une même cause conduit à deux effets: crise économique et crise climatique.
La perte de confiance entre les agents économiques, c'est "un froid" qui s'installe entre les hommes. La chaleur qui a quitté les relations humaines est, en quelque sorte partie dans l'atmosphère... la thermodynamique s'y retrouve! Tenons-nous là la loi qui régit un métasystème socio-écologique que la saturation du globe terrestre par l'homme a fait émerger? La double crise, climatique et économique ne serait alors que la première manifestation d'une rétroaction régulatrice.
C'est bien de régulation qu'il s'agit! Autrement dit, si la Loi n'est pas internalisée, elle nous revient par l'extérieur: "l'environnement" en catastrophe. Nous retrouvons le schéma du "shema", "Ecoute Israël [...] si tu écoutes et obéis à mes commandements et aimes ton Dieu de tout ton coeur [...] je donnerai la pluie en son temps [...] sinon il n'y aura pas de pluie et la terre ne donnera pas ses récoltes..."

Mais une fois la crise passée, la consommation "sale" risque de repartir de plus belle. Encore une fois ce n'est pas la consommation par elle-même qui est mauvaise, c'est ce qu'on nous fait consommer et comment il est produit. Il est à craindre que la communauté internationale aura du mal à passer d'elle-même à un mode de vie durable.

Que faire? Pouvons-nous - nous simples humains - influer sur un système macro-économique tout puissant? Y a-t-il encore un capitaine à la barre? Les personnes morales qui dominent le jeu mondial - Etats, banques, fonds financiers, cartels - ont un tel pouvoir, tant de capital qui équivaut à un temps de travail quasi éternel...
Mais derrière ces masques, il n'y a que des hommes qui s'agitent en nombre, les animent et leur donnent leur force!
La faute? Le culte d'Abondance. De simple conséquence des transactions honnêtes conduites en confiance, de simple moyen d'échange, la voilà posée en but de toute action. La voilà qui guide le peuple, se fait Marché qui marche tout seul. Le Veau d'or, raconte le Midrash, s'est animé, est sorti tout seul du creuset et s'est mis à danser...

Illustration: Henri Meyer - 1892

Cela fait longtemps que l'argent qui servait à acheter ou vendre une marchandise est devenu lui-même marchandise achetée et vendue; l'argent donné en échange du temps de travail, "fait des petits" tout seul par travail du temps. Mais il a fini par prendre le pouvoir...
Or sans que personne ne le décide vraiment, la crise a pratiquement rétabli l'interdit biblique du prêt à intérêt en offrant des crédits à taux zéro. Si quelqu'un nous avait dit avant la crise qu'il faut revenir aux prêts gracieux pour sauver l'économie, on lui aurait rit au nez! Voilà une autre rétroaction salvatrice qu'il faudrait méditer.


La solution est entre nos mains: dans un premier temps, tout faire pour que la crise se prolonge. C'est facile et c'est en notre pouvoir, nous, les consommateurs.
Ne consommons pas d'avantage! Nous ne vivons pas si mal comme cela. Faisons la grève de la consommation. Ainsi, même si techniquement la crise pourrait prendre fin, elle se poursuivra.

Il faut pour cela bloquer la relance. Eviter de reprendre confiance. Ne prenez pas de crédit. Dites-vous que tous les banquiers et les financiers sont des escrocs. Fini la foi dans les faux dieux!


Cette croissance exponentielle ne peut être laissée à elle-même


Il faut éviter toutes les manipulations du marketing, les incitations à la consommation. Zapper la pub, détourner le regard des panneaux publicitaires. Vivre simple, satisfaire ses vrais besoins, pas ceux qu'on nous fabrique. Moins on possède, moins on a de soucis! Les choses les plus précieuses ne peuvent être achetées: l'amour, l'air pur, le parfum de la terre après la pluie, le rire d'un enfant...

Et les pauvres me direz-vous, ils vont être encore plus pauvres! C'est facile à dire quand on vit à l'aise! Ecolos bobos!
La croissance, nous l'avons bien vu, n'empêche pas la pauvreté. Elle ne fait qu'augmenter les disparités. Assez d'hypocrisie, il suffirait d'un impôt minuscule sur les transactions spéculatives mondiales pour éliminer totalement la pauvreté. Quant à la crise climatique, c'est la pauvreté assurée, et à grande échelle: sécheresses, famines, cyclones, inondations, eau polluée, maladies... Ces plaies frapperont les pauvres et le tiers monde d'abord.
Là-aussi nous pouvons répondre par notre action: s'associer aux plus pauvres, former des coopératives, et donner a ceux qui n'ont pas le minimum, partager, c'est le plus grand bonheur.
La vraie richesse, c'est la connaissance. Ouvrons à tous son accès. Au chômage, étudions, enseignons.

Puis, si l'on veut s'offrir quelque objet ou distraction, choisissons-les avec soin, non producteurs de gaz à effet de serre, non polluants et fabriqués de façon durable. La production suivra docile.

Une petite bibliographie:
















Jérusalem est duelle. L'unité est au-delà, à construire ensemble

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